Bilan technique de deux transats (pour les voileux qui s'y intéressent) :


Après une dizaine de jours à Horta, il est temps de faire la synthèse de ces deux expériences riches qu'ont été nos traversées océaniques.


La première, la plus longue (21 jours) est souvent celle qui semble la plus facile : vent dans le dos, poussé par les alizés, avec le grand soleil et la température qui augmente tranquillement.

Pour nous, elle fut en effet facile dans la mesure où nous avions décidé dès le départ de ne naviguer que sous foc. La grand voile est restée dans sa housse jusqu'à notre rupture d'étai. Le vent étant assez puissant, entre 20 et 25 nœuds en moyenne (force 5 à 6) cette option ne limitait pas vraiment la vitesse du bateau dont la moyenne s'est située à 6 nœuds avant l'avarie d'étai.

Pas vraiment de « grain », un temps superbe même si la température a mis du temps à monter, surtout pour les quarts de nuit.

Le confort sur cette traversée était relatif. Nous avons toujours eu une mer assez croisée et si le bateau ne « roulait » pas vraiment il avait des mouvements brusques auxquels nous nous sommes habitués plus ou moins.

Le régulateur d'allure, qui ne fonctionne qu'avec l'aide du vent, a barré les ¾ du temps, le reste a été fait avec le pilote électrique, plus précis. Le régulateur a besoin de 10 nœuds de vent apparent pour bien fonctionner, mais après la rupture d'étai, nous avons plus utilisé le pilote, plus précis pour préserver la mâture.

Question énergie, nos deux panneaux solaires (190W) ont fourni en général le courant nécessaire à la vie à bord tant que le pilote ne fonctionnait pas. La consommation du bord est alors de 2,5 A/h en moyenne, les panneaux chargeant 4 à 6 A/h durant environ 6 heures. Nous n' avons démarré le moteur pour une charge complémentaire que rarement, lorsque le pilote fonctionnait. La consommation passe alors à 4 à 5 A/h, les panneaux ne suffisent plus à compenser la décharge.


Nous n'avons pas échangé beaucoup sur cette première traversée avec d'autres bateaux, l'arrivée aux Antilles se faisant dans de nombreuses îles différentes et les « transateux » sont noyés dans les bateaux locaux. Sur les trois ou quatre bateaux avec qui nous avons échangé, deux ont cassé leur bôme ! Empannage intempestif sous un grain ou une vague croisée (la voile passe brutalement d'un bord sur l'autre) et crac ! Forcément, si leur moyenne était meilleure que la nôtre avant, elle a baissé après et la facture, elle, a augmenté !

L'anticipation est aussi source de sécurité. Ainsi notre rupture d'étai a été sans conséquence, alors qu'elle aurait pu être dramatique si nous n'avions pas à poste l'étai largable avec sa trinquette.


Bref, en préservant l'équipage, on préserve son bateau...et son porte-monnaie !


Deuxième transat pour le retour en 18 jours jusqu'à Flores.

Clairement, nous avons pris l'option gagnante en taillant par la route directe, celle du petit temps et du vent de face. En terme de vent de face, il était juste dans la bonne direction pour nous faire avancer à bonne vitesse, sous foc ou sous le grand Code 0 de 45m². Le bateau était gentiment calé et nous avons dormi sans souci et profondément tout le temps. Sur les derniers jours, un vent de face très faible nous a fait préférer faire du moteur pendant 48 heures, mais finalement ce n'est pas beaucoup pour 18 jours de mer.

Les bateaux qui ont pris l'option nord, celle normalement des vent portants, ont essuyé un coup de vent puis se sont retrouvé à finir avec du vent de face aussi. Nous avons vu des équipages fatigués, bien plus que nous !

Là aussi route sous régulateur d'allure, mais nous avons utilisé plus souvent le pilote électrique, le vent étant faible.

Le bateau marchait bien, et souvent par 6 nœuds de vent réel, nous avancions à 4 ou 5 nœuds sous Code 0 ! le bonheur !


Une chose est sûre, les traversées, c'est long et il faut trouver des occupations : mots fléchés, sudoku, lecture, podcast, jeu de dés... en alternance avec des siestes pour compenser les nuits courtes. Les manœuvres sont rares, la barre pas très intéressante, il faut trouver son rythme ! Il apparaît au bout de deux ou trois jours.


Bref, de bonnes traversées, sans problème hors la rupture de l'étai. Nous sommes heureux de ce voyage, de ces expériences très riches qui nous ont permis des découvertes sensationnelles.

Et je ne vous dis pas le plaisir à chaque fois que la terre apparaît à l'horizon après tant de temps en mer ! C'est toujours aussi magique, même après 45 ans de navigation !